Fondements et Postulats

Philosophiques du Bouddhisme

 

Dernière mise à jour 16/12/98


 Les textes ci dessous ont été rédigés par C. Prud'homme auteur du site "Le Bouddhisme Theravâda".
Le bouddhisme theravâda avec l'aimable autorisation de son auteur.


Les quatre nobles vérités
Elles contiennent et fondent à elles seules toutes les connaissances du corpus bouddhique en quatre textes fondamentaux.
Elles furent présentées par Bouddha Sakyamuni en personne lors de son premier sermon.

L'octuple noble sentier
L'octuple noble sentier préconise huit conduites propres à développer l'attention et la connaissance dans le but de la cessation de la souffrance puis de " l'extinction ".
 

 


La souffrance - Dukkha

Cette première vérité repose sur une simple constatation froide et implacable : le monde est souffrance (dukkha). Cette souffrance ressentie par le sujet est la conséquence nécessaire de l'existence individuelle. Dukkha, qui sera utilisé tout au long de ces pages, est bien entendu beaucoup plus qu'une simple souffrance physique ou morale. Dukkha signifie aussi inachevé, imparfait, interrompu, impermanent. Sous cet aspect d'impermanence, dukkha s'applique à toutes les manifestations du monde physique, psychologique et mental. L'impermanence c'est le caractère transitoire de toute chose : une idée advient puis conduit à une autre ou disparaît, un sentiment désagréable fait place à un sentiment agréable et réciproquement, un être naît, grandit, vieillit et meurt, la matière au contact d'autres éléments se combine sous d'autres formes d'organisation dans un vaste processus de transformation, ...
Ce ne sont pas seulement les choses négatives qui sont dukkha, mais tout ce qui est impermanent, plaisir et déplaisir sont dukkha, jouissance et restriction sont dukkha, appropriation ou renoncement sont dukkha.
Dukkha a donc trois acceptations : la première est la souffrance en tant que telle, la seconde est l'interruption de conditions ou d'états heureux, la troisième est le conditionnement d'une chose par une autre (conception développée dans la théorie des cinq agrégats). En effet, si la vision des événements au travers de l'analyse suivant les cinq agrégats permet déjà une meilleure compréhension de leur prégnance et des mécansimes à l'oeuvre sur le sujet, c'est parce qu'ils sont des agrégats d'attachement. 
 


 
 

La cause de Dukkha est l'attachement

Le moteur principal de dukkha c'est la soif de l'existence.
Le bouddhisme insiste bien sur le fait que la souffrance n'est pas le fruit d'une quelconque fatalité, ni l'expression d'une volonté divine aveugle ou punitive. Il y a dukkha quant il y a manque, quand il y a volonté d'obtenir, quand il y a perte ou interruption de jouissance, quand il y a inoptention de ce qui est voulu. 
La notion d'attachement est importante, car elle montre bien le lien et la dépendance d'une chose sur une autre. Il suffit, pour une raison ou pour une autre, que ce lien ne s'établisse pas, ou qu'il s'interrompe ou que l'une ou l'autre des choses liées disparaisse, pour qu'il y ait dukkha.
Cet attachement concerne aussi bien le désir des sens, les éléments matériels que les idées, les idéaux, les pensées, les théories ou les croyances.
 


 
 
 

Dukkha cesse quand l'attachement cesse
Il ne s'agit pas de rompre ou de briser brutalement l'attachement aux choses, il ne s'agit pas non plus de le nier ou de le rejeter, il ne s'agit pas de renoncer ou d'abandonner le monde pour s'enfermer dans une vie pure, mais abstraite. Il s'agit de se mettre à l'abri de la souffrance en identifiant les processus de causalité à l'œuvre dans toutes nos actions et en particulier ceux qui conduisent à dukkha. La cessation de dukkha ne peut être durablement obtenue que par l'identification et la compréhension rigoureuse des processus de causalité. 
Il s'agit d'un travail de connaissance du monde, mais surtout de connaissance de soi.
Il ne s'agit pas d'être coupé du monde, mais au contraire de dévoiler le mécanisme de causalité qui fait le monde.


 
 
 

Il existe une méthode pour la cessation de dukkha
La voie du bouddhisme prône la connaissance. Si elle est appelée troisième voie, c'est parce qu'elle se situe entre-deux extrêmes, constitués d'un côté par l'unique jouissance des sens physiques et de l'autre côté par l'auto éradication de toute forme de sensualité par l'observation de pratiques ascétiques et de nombreux interdits. La visée du bouddhisme est plus haute que la simple cessation de dukkha, et entend arriver à une libération complète de la souffrance.
Cette réalisation consiste à ne pas se placer dans une causalité subie. Ayant identifiée la provenance et le but de nos sentiments, actes ou attirances, le sujet agit de manière à contrôler, orienter les effets de son action et de ce fait parvient à éviter la souffrance. 
Cette voie est appelée l'octuple noble sentier.
 


 

 
L'octuple noble sentier
ou
la voie du milieu

L'octuple noble sentier préconise huit conduites propres à développer l'attention et la connaissance.
 


  Il ne faut pas limiter l'acception de "juste" (sammâ) au sens d'équitable, mais au sens de précis, de mesuré et n'engendrant pas d'effets négatifs. Juste, c'est aussi "nécessaire et suffisant", efficace. Juste, c'est encore "ni trop, ni trop peu" où on retrouve le juste milieu, c'est-à-dire la voie du milieu. 
 

1
La compréhension juste ~ sammâ ditthi ~ 
Il s'agit de la compréhension dans toutes leurs implications des quatre nobles vérités. Il s'agit de la mesure du sujet qui peut se mettre non pas en retrait du monde, mais simplement à distance. 
 

 2
La pensée juste ~ sammâ sankappa ~
 La pensée est entendue comme un effort en soi et comme une action en puissance. La pensée s'inscrit également dans l'enchaînement des causes et des actions. Aussi bien les pensées négatives sont des réactions inadaptées aux problèmes rencontrées, aussi bien elles n'engendrent que des conséquences aussi négatives sinon plus. 

 

 3
La parole juste ~ sammâ vâcâ ~ 
La parole est une dépense d'énergie et s'inscrit immédiatement dans un réseau complexe de significations et d'interprétations. Chacun a pu mesurer la portée de mots mal placés (et pas nécessairement malveillants) et les conséquences de paroles non explicites, mal comprises, mal énoncées. 
Naturellement les paroles blessantes, humiliantes, insultantes, vulgaires et grossières sont à éviter et à proscrire. 

 

 4
L'action juste ~ sammâ kammanta ~ 
Là encore chacun peut comprendre au quotidien les effets d'actions (ou le défaut d'actions appropriées) se faisant au détriment de soi-même, des autres ou de l'intérêt général (la société occidentale actuelle en est d'ailleurs le triste reflet). 

 

 5
Les moyens d'existence justes ~ sammâ âjiva ~ 
De tous temps, le bouddhisme s'est illustré dans une longue tradition non violente, proscrivant toute activité commerciale reposant sur l'asservissement ou la destruction.

 

 6
L'effort juste ~ sammâ vâyâma ~ 
L'effort juste, c'est l'idée d'un certain travail à accomplir sur soi pour mettre en oeuvre les sept autres voies vers la cessation de dukkha. Il ne s'agit pas de s'anesthésier du monde ni de fusionner avec le monde, mais bien d'être soi-même. 

 

 7
L'attention juste ~ sammâ sati ~ 
Avec l'attention juste et la concentration juste on pénètre dans un champ sémantique qui fait référence à la pratique de la méditation. L'attention juste c'est précisément de ne pas se faire absorber par ce qui vient du monde extérieur, de ne pas se faire ébranler ou heurter par ce qui vient du monde extérieur, mais simplement de noter que ce qui est extérieur quoi qu'il soit est justement définitivement et résolument extérieur. 

 

 8
La concentration juste ~ sammâ samâdhi ~ 
La concentration juste renvoie à une technique de méditation particulière qui tend à mettre en application les quatre nobles vérités et l'octuple noble sentier au travers d'une connaissance rigoureuse des mécanismes percepto-sensitifs et cognitifs et qui vise à la sortie de l'enchaînement des causes et des effets. 

La mise en pratique de ces dispositions ne consiste évidement pas à devenir un benêt, sympathique, souriant, naïf, réservé, passif, timoré et introverti. Non, c'est tout le contraire.

Nota : sammâ est quelques fois traduit par droit (droite), parfait (parfaite) ou complet (complète). Ces traductions placent l'acception dans une échelle de valeur qui n'est pas tout l'enjeu de cette démarche. Le mot "juste", comme précis, comme nécessaire et suffisant paraît beaucoup plus approprié.  Retour au texte
 

Merci une fois encore à christian Prud'homme ! Vous avez ici l'essentiel de ce qui fonde la doctrine bouddhiste, ultérieurement je vous présenterai ce qu'advint le bouddhisme au Japon même : le zen. Je citerai quelques anecdotes relatives aux grands maîtres zen tels que Takuan ou Tendaï  ...

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